Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
« Tesla a fait totalement faillite. » Ce canular du 1er avril imaginé par le charismatique fondateur du groupe, Elon Musk, a été sans doute pensé pour dédramatiser le newsflow négatif du spécialiste de la voiture électriques. L’homme a beau être un disrupteur de talent, force est de le reconnaître, Tesla (TSLA – NASDAQ) rencontre actuellement de grosses difficultés.
Et ce, à plus d’un titre… En effet, entre fin mars et début avril les mauvaises nouvelles se sont enchaînées. Je pense d’abord à ce gros bad buzz dont le groupe se serait bien passé impliquant le système AutoPilot de Tesla (logiciel permettant un certain nombre de manœuvres sans l’intervention du conducteur) dans un crash mortel en Californie. Ensuite, le rappel de 123 000 Model S en raison d’une défaillance de direction assistée sur les voitures construites avant avril 2016. Et, enfin, les gros retards de production du Model 3 (2 020 unités produites contre 2 500 attendues)…
Alors, oui, Elon Musk s’est félicité de sa cadence de production. Mais, il n’empêche, ce chiffre reste bien en dessous des objectifs qu’il avait annoncés (2 500 par semaine). Et l’homme persiste et signe, le temps de corriger certains bugs dans sa chaîne de production robotisée à l’extrême, et Tesla devrait bientôt sortir 5 000 voitures de ses usines (fin juin ?). Un pari que bon nombre d’observateurs jugent peu réalisable.
Tesla au bord du défaut de paiement
Mais Elon Musk y croit. En fait, pour le dire autrement, il n’a pas d’autres choix que d’y croire. La situation financière de Tesla atteint un niveau critique. D’abord, le groupe n’a jamais été rentable. Il a pourtant été créé il y a une quinzaine d’années ! L’an dernier, si le groupe a dégagé un chiffre d’affaires de 9,6 Mds$, il a également perdu 2,2 Mds$…
Et que dire de sa trésorerie ? Elle fond comme neige au soleil à tel point que certains estiment que le groupe sera obligé d’emprunter au moins 2 Mds$ pour refinancer ses obligations arrivant à échéance. A ce stade, l’augmentation de capital n’est pas bien loin… et, croyez-moi, elle sera dilutive. Les obligations cotées se traitant autour de 85% du nominal, avec un taux de 7,5%, les agences de notation considèrent déjà Tesla comme proche du défaut de paiement. Difficile dans ces conditions d’accepter une valorisation de 42 Mds$. Depuis son point haut du 26 février, à 359 $, le titre a rendu 30% environ.
Et c’est d’autant plus difficile que, dans le secteur automobile, les comparaisons ne plaident absolument pas en faveur de Tesla. Tenez, prenons Renault (PA:RENA) dont la capitalisation est de 30 Mds€ alors que ses fondamentaux sont excellents, avec un chiffre d’affaires 2017 de 58,7 Mds€ pour un bénéfice net de 5,1 Mds€.
Tesla la fin d’un monopole ?
Vous pourrez arguer que Tesla est un pionner dans son domaine. Certes. C’est un point de vue. Sauf que, à l’heure actuelle, bon nombre de constructeurs se sont lancés, eux aussi, sur le segment de la voiture électrique. Et ils ont des moyens financiers nettement plus élevés que Tesla. Le groupe a donc des soucis à se faire car la fin de son monopole est proche…
Vous voulez mon avis ?
Ce dossier est trop compliqué pour s’y intéresser. Autant je pense que les modèles de Facebook (NASDAQ:FB) ou encore d’Amazon (NASDAQ:AMZN) sont solides – même s’ils ont connu des soubresauts boursiers la semaine dernière – autant je suis beaucoup plus réservé sur le modèle de Tesla. Pour moi la faillite n’est pas loin… N’oubliez pas que près de 20% du capital de Tesla est shorté, c’est-à-dire vendu à découvert. Elon Musk en a peut-être rigolé le 1er avril dernier mais sa blague pourrait bien se muer en prophétie auto-réalisatrice… Et, comme un avertissement, elle lui a déjà coûté quelques milliards de dollars en Bourse.