Sarkozy dénonce une "manipulation" dans le dossier libyen

Reuters

Publié le 22/03/2018 18:42

Sarkozy dénonce une "manipulation" dans le dossier libyen

par Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Mis en examen pour des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy a entamé jeudi sa contre-attaque médiatique en dénonçant une "manipulation" et une "calomnie" qui lui font vivre un "enfer" depuis 2011.

Le Figaro a publié sur son site internet ce que le journal présente comme le verbatim des déclarations de l'ex-chef de l'Etat aux juges qui l'ont mis en examen.

La chaîne TF1 (PA:TFFP) a annoncé quelques heures plus tard que l'ancien "hyper-président" à l'éclat terni par une succession de déboires électoraux et judiciaires depuis 10 ans [nL8N1R42W6] serait l'invité de son journal télévisé de 20h00.

A l'issue de deux jours de garde à vue à Nanterre (Hauts-de-Seine), Nicolas Sarkozy a été mis en examen mercredi soir pour financement illicite de campagne électorale, corruption passive et recel de détournement de fonds publics libyens [nL8N1R31D3]. Des infractions passibles de dix ans de détention.

Déjà en examen dans deux autres affaires en cours [nL8N1R340G], il a en outre été placé sous contrôle judiciaire.

Nicolas Sarkozy ne peut ainsi pas aller dans "plusieurs pays" ni entrer en contact avec "plusieurs personnes", dit-on de source judiciaire. Selon BFM TV, ce sont l'Egypte, la Tunisie, la Libye, l'Afrique du Sud et le Royaume-Uni, ainsi que ses anciens collaborateurs et ministres Claude Guéant et Brice Hortefeux, l'ex-chef du renseignement intérieur Bernard Squarcini et l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine.

"CALOMNIE"

L'ancien président a continué à nier toute malversation.

"Je suis accusé sans aucune preuve matérielle", a dit aux juges l'ex-chef de l'Etat, qui a dénoncé les "mensonges" de Ziad Takieddine, un de ses principaux accusateurs, qu'il accuse d'avoir "pillé l'Etat libyen".

Il a fait aussi valoir que les déclarations de Mouammar Kadhafi, "de sa famille et de sa bande" évoquant un financement de sa campagne de 2007 avaient commencé le 11 mars 2011, après qu'il a reçu à l'Elysée les opposants au dirigeant libyen, au renversement duquel il a fortement contribué en prenant la tête d'une coalition internationale contre son régime.

D'anciens dignitaires du régime Kadhafi ont évoqué le versement d'argent à Nicolas Sarkozy, comme l'ex-patron du renseignement militaire libyen Abdallah Senoussi ou un proche collaborateur de Mouammar Kadhafi, Bechir Saleh.

Selon le site d'information Mediapart, un carnet de l'ancien ministre libyen du pétrole, Choukri Ghanem, retrouvé mort dans le Danube le 29 avril 2012, à Vienne, mentionne des versements destinés à sa campagne présidentielle de 2007.

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"Depuis le 11 mars 2011, je vis l'enfer de cette calomnie", a déclaré Nicolas Sarkozy aux juges, selon le verbatim publié par Le Figaro. Il a notamment estimé que "la polémique lancée par Kadhafi et ses sbires" et le site d'information Mediapart lui avait valu de perdre l'élection présidentielle de 2012.

SARKOZY VOULAIT LE STATUT DE TEMOIN ASSISTE

"Les faits dont on me suspecte sont graves", a-t-il ajouté. "Mais si, comme je ne cesse de le proclamer (...) c'est une manipulation du dictateur Kadhafi ou de sa bande ou de ses affidés, dont Takieddine fait à l'évidence partie, alors je demande aux magistrats que vous êtes de mesurer (...) la violence de l'injustice qui me serait faite."

"Je vous demande de retenir (...) un autre statut que celui de mis en examen : celui de témoin assisté", a-t-il conclu.

Les juges d'instruction, dont Serge Tournaire, qui intervient également dans d'autres investigations visant l'ancien chef de l'Etat, en ont décidé autrement.

Ce rebondissement dans la saga judiciaire de Nicolas Sarkozy, encore influent à droite, bien qu'il ait officiellement pris sa retraite politique après sa candidature avortée à la présidentielle de 2017, a mis en émoi son ancien camp.

Mais les ténors des Républicains, héritiers de son parti, l'UMP, ne se sont pas bousculées jeudi pour commenter sa mise en examen ou s'en sont tenus à des propos prudents. [nL8N1R469O]

Quant à Xavier Bertrand, ancien ministre de Nicolas Sarkozy, il a estimé sur CNEWS que "personne (n'était) au-dessus des lois", tout en assurant n'avoir rien trouvé de bizarre lors de la campagne de 2007, dont il a été un des porte-parole.