Reuters
Publié le 27/06/2022 07:03
par Robin Emmott et Humeyra Pamuk
MADRID (Reuters) - Les dirigeants de l'Otan, réunis pendant trois jours en sommet à Madrid à compter de mardi, vont exhorter le président turc Recep Tayyip Erdogan à lever son veto aux candidatures de la Suède et de la Finlande, sur fond de volonté des Occidentaux de montrer à la Russie et à la Chine leur détermination.
Alors que l'offensive de la Russie en Ukraine est entrée dans son cinquième mois, le sommet intervient à un moment crucial pour l'Alliance transatlantique, après les errements du retrait d'Afghanistan et les discordes internes durant le mandat de l'ancien président américain Donald Trump, qui a menacé de retirer les Etats-Unis de l'Otan.
Si les négociations au sein d'une organisation souvent minée par les tensions se poursuivent, ont indiqué des diplomates, les dirigeants espèrent aussi convenir de fournir à l'Ukraine une aide militaire supplémentaire, d'accroître les dépenses communes en matière de défense, de lutter avec davantage de fermeté contre l'émergence militaire de la Chine et de placer davantage de soldats en état d'alerte pour protéger les pays baltes.
L'Espagne, pays hôte, veut par ailleurs que l'Otan ne se détourne pas de son flanc méridional, afin de faire face aux flux migratoires dans la région et aux groupes armés qui sévissent au Sahel.
"Nous allons faire davantage pour nous assurer que nous pouvons défendre chaque centimètre du territoire des alliés, à tout moment et contre toute menace", a déclaré le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, lors d'un discours la semaine dernière.
Bien que des représentants britanniques et américains ont affiché leur opposition à la demande des pays baltes d'avoir des troupes de l'Alliance déployées de manière permanente dans la région, il est attendu qu'un compromis soit trouvé lors du sommet sur la promesse de l'envoi de renforts rapides.
SCEPTICISME SUR UN ACCORD À MADRID AVEC ANKARA
Alors que l'Otan n'a aucune obligation à défendre l'Ukraine, qui n'en est pas membre, l'offensive lancée par la Russie le 24 février a provoqué un virage géopolitique, des pays jadis neutres comme la Finlande et la Suède cherchant désormais à intégrer l'Alliance, tandis que l'Ukraine a formellement obtenu le statut de candidat à l'Union européenne.
Le possible élargissement de l'Otan est un scénario que le président russe Vladimir Poutine veut éviter.
"Cela envoie un message important à Poutine. Et cela renforcerait, je pense, l'Alliance de manière significative", a déclaré le sénateur américain Angus King en référence à la Finlande et la Suède à l'issue d'un voyage en Finlande, Lettonie et Turquie.
Toutefois, l'unité de l'Alliance est mise à l'épreuve par la Turquie, qui reproche à la Finlande et à la Suède leur soutien à des groupes kurdes qu'Ankara considère comme des terroristes.
Un représentant du gouvernement turc impliqué dans les négociations entre la Turquie, la Finlande et la Suède a déclaré à Reuters, de même que Jens Stoltenberg, qu'il serait difficile de parvenir à un accord lors du sommet de Madrid, fixant comme condition préalable que Stockholm et Helsinki répondent aux préoccupations d'Ankara.
Deux diplomates de haut rang de l'Otan disent voir dans cette querelle des motivations politiques. La ligne adoptée par Recep Tayyip Erdogan s'avère populaire en Turquie, en amont de l'élection présidentielle de juin 2023, alors qu'il cherche à mettre en question les priorités des Etats-Unis et des Européens.
Il est possible que le président américain Joe Biden s'entretienne avec son homologue turc en marge du sommet afin de réclamer à Recep Tayyip Erdogan davantage d'avancées avec la Suède et la Finlande, dont les dirigeants seront aussi présents à Madrid.
(Reportage Robin Emmott et Humeyra Pamuk, avec Sabine Siebold, Andrea Shalal et Belen Carreno à Madrid, Jonathan Spicer et Orhan Coskun à Ankara; version française Jean Terzian)
Auteur:: Reuters
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