La contestation des agriculteurs va s'intensifier, le gouvernement se veut à l'écoute

Reuters

Publié le 23/01/2024 12:11

Mis à jour le 23/01/2024 22:50

PARIS (Reuters) - Les agriculteurs français, en colère face à la précarité croissante de leur profession, ont prévu d'intensifier mercredi leur mobilisation à travers le pays, alors qu'aucun signe d'apaisement n'est apparu mardi, avec des actions qui se sont multipliées, en dépit de la volonté affichée par le gouvernement d'être "à l'écoute".

Le mouvement de contestation a été endeuillé par un accident mortel dans l'Ariège. Une agricultrice trentenaire a été percutée tôt mardi matin par un véhicule à un point de blocage mis en place à Pamiers.

Sa fille, grièvement blessée dans l'accident de même que l'époux de l'agricultrice, a succombé à ses blessures en fin de journée, a annoncé le procureur de la République auprès du tribunal de Foix, Olivier Mouysset.

D'après les premiers éléments de l'enquête, a-t-il déclaré plus tôt dans la journée, cet incident n'est pas intentionnel.

Le véhicule a percuté un mur de bottes de paille érigé en travers de la route nationale 20 à Pamiers avant de heurter les trois victimes, présentes avec plusieurs dizaines d'autres agriculteurs sur un campement installé juste derrière, a détaillé Olivier Mouysset.

Il s'agit d'un "drame qui nous touche tous", a déclaré le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, qui s'est rendu en fin d'après-midi à Pamiers où il a "témoigné l'émotion de la nation".

Les agriculteurs "ont d'abord besoin qu'on les écoute, qu'on les comprenne et qu'on leur réponde, et c'est ce qu'on va faire", a dit par ailleurs le ministre devant des journalistes, ajoutant qu'il fallait "renouer la confiance" en ce moment de "crise et de défiance".

"Des choses sont prévues dans le Pacte, qu'il nous faut étoffer (...) Il faut qu'on avance. Il faut que ça change", a poursuivi Marc Fesneau, soulignant que le Premier ministre Gabriel Attal s'est "engagé à apporter une réponse rapide".

Le chef du gouvernement, qui a rencontré lundi des représentants des syndicats agricoles, a reçu en début de soirée à Matignon la Confédération paysanne - un rendez-vous initialement programmé mercredi matin. Aucune avancée concrète n'a été communiquée.

"Dès demain (mercredi), les actions vont s'amplifier", a déclaré le président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), Arnaud Rousseau, lors du journal de 20 Heures de TF1 (EPA:TFFP).

"La totalité des départements seront en action d'ici la fin de la semaine", a-t-il ajouté, soulignant que "la colère monte".

"REMETTRE L'AGRICULTURE COMME STRATÉGIQUE"

Les syndicats agricoles réclament des mesures rapides face au malaise de la profession, alimenté par une précarisation de l'activité, une multiplication des normes et des différences de traitement par rapport à d'autres pays extra-européens.

Obtenez l’App
Rejoignez les millions de personnes qui utilisent l’app Investing.com pour suivre les marchés.
Télécharger maintenant

"Il y a une déconsidération du métier d'agriculteur par rapport aux revenus, aux normes - aussi bien au niveau européen que français", a déclaré Luc Smessaert, producteur laitier dans l'Oise et vice-président de la FNSEA.

"Partout en France (il y a) la nécessité d'être entendu par nos politiques, par notre gouvernement, mais surtout qu'au niveau européen ça bouge", a-t-il dit à Reuters. "Il y a des élections européennes dans cinq mois, il faut absolument qu'on remette l'agriculture comme stratégique et que, surtout, on encourage les agriculteurs".

Des barrages bloquaient mardi de nouveaux axes routiers, dont l'A7 dans la vallée du Rhône et l'A63 près de Bayonne dans le Sud-Ouest, qui s'ajoutent aux actions déjà menées ces derniers jours, notamment sur l'A64 près de Toulouse.

Christophe Beeuwsaert, producteur céréalier et laitier, a fait part à Reuters de son "ras-le-bol d'une pression constante sur les contrôles et sur les prix de ventes de nos produits". "Les centrales d'achat sont en pleines négociations avec nos industriels et on est en train de brader nos produits agricoles", a-t-il déclaré.

"D'un côté, nos charges augmentent. On nous annonce une augmentation de l'électricité (...) et de l'autre côté Lactalis nous annonce une baisse du prix du lait de 15%", a-t-il ajouté, estimant qu'industriels et centrales d'achat protégeaient leurs marges "sur le dos des producteurs et des consommateurs".