EXCLUSIF: L'Iran restreint l'accès de l'AIEA à sa principale usine d'enrichissement après une attaque, selon des diplomates

Reuters

Publié le 01/07/2021 16:36

par John Irish et Francois Murphy

PARIS/VIENNE (Reuters) - L'Iran a restreint l'accès des inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à sa principale usine d'enrichissement d'uranium de Natanz, le pays invoquant des problèmes de sécurité après ce qu'il considère être une attaque du site par Israël en avril, selon des diplomates.

L'impasse, qui, selon un responsable, dure depuis des semaines, est sur le point d'être résolue, ont indiqué des diplomates, mais elle a accru les tensions avec l'Occident au moment même où les pourparlers indirects entre l'Iran et les États-Unis sur la relance de l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien ont été ajournés sans qu'une date ne soit fixée pour leur reprise.

Cette décision fait également suite à diverses actions de l'Iran ayant entraîné une violation de l'accord de 2015 et suscité la colère de Washington et de ses alliés. Parmi elles l'enrichissement de l'uranium à un niveau proche de la qualité militaire ou encore l'incapacité d'expliquer l'origine des particules d'uranium que l'organisme de surveillance nucléaire de l'Onu a trouvées dans plusieurs sites non déclarés.

"Ils nous provoquent", a déclaré un diplomate occidental qui suit de près l'AIEA, ajoutant que les inspecteurs devraient pouvoir disposer d'un accès complet la semaine prochaine.

Les responsables iraniens n'étaient pas immédiatement disponibles pour un commentaire. L'AIEA s'est pour sa part refusée à toute déclaration, invoquant sa position consistant à ne pas faire de commentaires sur les questions d'inspection.

Les raisons qui ont motivées l'Iran, au-delà des préoccupations officielles de sécurité et de sûreté mises en avant, ne sont pas claires, mais le pays a déjà été en conflit avec l'AIEA au sujet de l'accès aux sites nucléaires. En 2020, l'Iran a refusé à l'AIEA l'accès à deux sites pour des inspections rapides. En 2019, une inspectrice de l'agence, qui, selon les diplomates, avait demandé l'accès à Natanz, a été retenue et ses documents de voyage ont été saisis.

Jusqu'à présent, l'AIEA n'a pas signalé le problème à ses États membres et n'a pas non plus convoqué une réunion d'urgence de son Conseil des gouverneurs, composé de 35 pays, comme elle l'avait fait en 2019 lorsque l'Iran a brièvement retenu cette inspectrice.

UNE ACTION CALIBRÉE

Une explosion et une coupure de courant survenues en avril à Natanz, qui se trouve au cœur du programme iranien d'enrichissement d'uranium, semblent avoir endommagé les centrifugeuses de l'usine souterraine d'enrichissement de combustible à l'échelle commerciale qui s'y trouve. Le dernier rapport trimestriel de l'AIEA sur l'Iran, publié en mai, a montré que sa production d'enrichissement avait ralenti.

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"En raison de l'accident/sabotage survenu en avril, certains accès ont été limités pour des raisons de sûreté et de sécurité", a déclaré un diplomate basé à Vienne, ajoutant que cette mesure "a eu très peu d'impact sur la capacité de l'agence à effectuer des vérifications".

L'AIEA et l'Iran ont discuté de la question "afin d'éviter que ces limitations ne deviennent permanentes et commencent ainsi à éroder la capacité de vérification", a-t-il ajouté.

Washington et ses partenaires européens ont fait pression sur l'Iran en raison de ses violations de l'accord, qui visait à allonger le délai dont Téhéran aurait besoin pour produire une arme nucléaire s'il le souhaitait. L'Iran insiste sur le fait que ses objectifs nucléaires sont entièrement pacifiques.

Les inspections et la surveillance ont également été sous les feux des projecteurs récemment, l'Iran ayant réduit sa coopération avec l'agence en février, supprimant ainsi la base juridique des inspections inopinées de l'AIEA dans les installations non déclarées, qui avaient été introduites par l'accord de 2015.

Dans le même temps, l'Iran a mis fin à la surveillance par l'AIEA de certaines activités nucléaires introduites par l'accord. Un accord temporaire avec l'AIEA a permis de maintenir cette surveillance dans le cadre d'un arrangement de type "boîte noire" en vertu duquel les données continuent d'être collectées mais l'AIEA n'y aura accès qu'à une date ultérieure.

Cet accord temporaire a toutefois expiré la semaine dernière et, selon l'AIEA, l'Iran n'a pas répondu lorsqu'on lui a demandé quel était le statut de cet accord, que l'AIEA espère prolonger.