Inflation : l’euro fragilisé

 | 04/04/2022 12:31

Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr

Pour Philippe Béchade, l’euro est aujourd’hui confronté à un problème de taille : comment faire face à une inflation structurelle, qui dure depuis plus d’un an, et contre laquelle la BCE ne s’est pas encore positionnée ? Et comment gérer une pénurie d’énergie qui sera probablement suivie de beaucoup d’autres ?

Sommée par Washington de choisir son camp face à un Poutine présenté comme l’incarnation du mal, l’Europe a donc choisi son camp en adoptant le principe d’une mise sous embargo progressive de la Russie, quitte à manquer de gaz, de titane, de nickel, d’engrais, etc.

Car quand le « camp du bien » affronte le mal, c’est dur pour tout le monde : il faut consentir des sacrifices pour que la victoire soit plus éclatante (« à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire »… vous connaissez l’adage).

En accédant à toutes les « propositions » américaines (boycott du gaz russe et achats massifs de GNL texan), l’Europe cesse d’incarner une hypothétique 3ème voie « indépendante » sur la planète et peut tirer un trait sur son ambition de tirer de notre « monnaie unique » des avantages assez comparables à ceux que le dollar procure à l’Oncle Sam.

Certes, Bruxelles n’applique pas l’extraterritorialité punitive du droit européen à quiconque utilise l’euro pour tout type de transaction dans le monde comme le fait Washington avec le dollar… mais en alignant son agenda géopolitique sur celui de son allié de l’OTAN (gel, ou plutôt confiscation des avoirs de personnalités russes puis – et c’est totalement inédit – de ceux de la Banque Centrale russe), cela revient à susciter la même méfiance que vis-à-vis des US.

Et en comparaison du dollar, une fois rayé son avantage de devise « indépendante » (son seul avantage face à la livre sterling), l’euro se trouve ramené à sa dimension d’instrument monétaire dysfonctionnel… miné des différentiels de performances économiques majeurs entre le Nord et le Sud et une hétérogénéité fiscale qui siphonne les flux de capitaux de grands pays à fort tissus industriel, au profit de petits pays axant tout leur développement sur les services financiers.

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La BCE impuissante ?
Mais voici l’euro confronté à un problème existentiel : comment faire face à une inflation structurelle, qui s’est installée dans notre quotidien depuis 12 mois et contre laquelle la BCE n’a rien pu faire, mais également une pénurie d’énergie qui sera probablement suivie de nombreuses autres ?

Alors que la BCE promet de se donner 6 mois avant d’entamer un cycle de resserrement monétaire, ce qui va assurer au dollar un différentiel de rendement de 150 à 175 Pts au minimum (selon que la Fed enchaînera 2 ou 3 tours de vis de 50 Pts de base), notre devise risque fort de poursuivre sa glissade sous les 1,080 $ et d’accélérer cette fois en direction de la parité d’ici l’automne.

Cette perte de valeur renchérira d’autant le coût de nos importations et le taux d’inflation global qui caracole déjà au-delà de 7% en Europe, et pas loin de 10% en Espagne (+9,8%).

Si cela confère un petit avantage à nos entreprises exportatrices, ce sera loin de compenser la hausse des coûts de production qui dérivent entre +26% (Allemagne) et +50% (en Belgique, si, si, j’ai vérifié, c’est vertigineux) en rythme annuel : le problème, c’est l’effondrement des marges, peut-être plus que les volumes, car c’est cela que les investisseurs achètent.

Pour l’heure, l’accélération des buybacks au début du 1er trimestre (les entreprises US ont annoncé des montants records depuis le 1er janvier) à hauteur de 310 Mds$, alimente un flux acheteur « mécanique » d’achat sur repli. Et le grand suspens des trimestriels à paraître en début de semaine prochaine, ce n’est pas tant la dégradation de la profitabilité anticipée ces 9 prochains mois (les guidances) que le ralentissement des programmes de rachat du fait de la hausse du coût de l’argent.

Racheter massivement ses propres titres avec de l’argent emprunté à 0,00%, ce n’est pas pareil avec des taux à 1,50% ou 2,5% à la fin de l’année… surtout si les flux de capitaux se contractent avec une baisse du chiffre d’affaires, causée par une demande qui « ne suit plus », sur fond d’inflation hors de contrôle.

De ce point de vue, l’Europe risque de voir son PIB perdre 0,5% en 2022 par rapport à la prévision initiale… ce qui semble exagérément optimiste après la division par 2 de l’objectif de croissance en Allemagne, de 3,6% vers 1,8%.

Et c’est sans compter des pénuries de gaz qui freineraient brutalement l’activité industrielle, au moins aussi durement que le confinement de 2020… mais avec des coûts de production qui s’envolent.

Le manque d’énergie est un péril auquel échappent totalement les entreprises américaines, chinoises ou russes, d’où la fragilisation de l’euro face au gonflement de notre dette extérieure qui va exploser en mars.

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