Etats-Unis: Les bonnes résolutions

 | 24/03/2013 10:19

La Réserve Fédérale n’a pas attendu la nouvelle année pour prendre de bonnes résolutions : dès septembre elle annonçait le QE3, et en décembre, elle réaffirmait son engagement à maintenir des taux bas. Pour l’instant elle s’y tient.

Cette semaine, le Congrès a voté, dans les temps, une résolution assurant le financement de l’Etat jusqu'à la fin de l’actuel exercice budgétaire (le 30 septembre). La prochaine date butoir est à présent le 19 mai, lorsque le plafond de la dette fédérale sera rétabli, et d’ici là, le Congrès doit fixer un nouveau plafond : au 19 mai, il sera automatiquement atteint. Au-delà, et notamment dans l’optique du vote du budget pour 2014, les propositions des deux chambres sont irréconciliables. Le projet de la Chambre prévoit un budget à l’équilibre dans dix ans, grâce à une baisse des dépenses discrétionnaires mais aussi obligatoires. La baisse de ces dernières est obtenue au moyen de la transformation de Medicare en un système de « bons » permettant de souscrire à une assurance privée, et un relèvement de 65 à 67 ans de l’âge d’éligibilité. Le Sénat, quant à lui, prévoit des hausses d’impôts. Les deux projets préconisent l’élimination de niches fiscales. On attend au cours des prochaines semaines, les propositions de la Maison Blanche.

On évite une fois de plus un shutdown du gouvernement, événement très perturbateur à défaut d’être courant. Les perspectives budgétaires demeurent pourtant floues, une raison de plus pour la Fed d’être aussi claire que possible. Les 19 et 20 mars, ses membres ont réitéré le même message. La troisième vague d’assouplissement quantitatif (QE3) se poursuivra au même rythme, soit des achats mensuels de USD 40 mds de MBS et de USD 45 mds de Treasuries à long terme. Le taux cible sur les Fed Funds demeure dans la fourchette de 0-0,25 % et sera maintenu à ce niveau aussi longtemps que le taux de chômage ne retombera pas en deçà de 6,5%, à moins que les perspectives d’inflation à un ou deux ans accélèrent, au-delà de 2,5%.

Ont également été publiées les prévisions actualisées des membres du FOMC pour la croissance du PIB, le taux de chômage, le déflateur de la consommation privé (inflation totale et sous-jacente) ainsi que la date probable du prochain resserrement monétaire et le probable niveau des taux au cours des deux prochaines années. Depuis décembre 2012, les révisions ont été marginales. Globalement, les membres de la Fed semblent légèrement moins optimistes quant à la croissance, mais légèrement plus confiants quant à la baisse du taux de chômage. Pour ce qui est de l’inflation, ils s’accordent à prévoir qu’elle demeurera sous l’objectif de 2% ces deux prochaines années. Un ou deux membres seulement prévoient une accélération au-dessus de 2,5% en 2015 (à 2,6%), laissant une marge de manœuvre importante à la Fed.

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La priorité restera donc le marché du travail, à propos duquel Janet L. Yellen, vice-présidente du Conseil des gouverneurs, a récemment fourni la liste des indicateurs qu’elle surveille : créations d’emplois, évolution du taux de chômage, vigueur de l’activité, taux d’embauche et de démission. Durant sa conférence de presse, Ben Bernanke a ajouté à cette liste les inscriptions initiales à l’indemnisation du chômage et la progression des salaires. Nous proposons dans le graphique ci-dessus deux indicateurs permettant de synthétiser ces données.

Les deux indices sont orientés à la hausse même si l’indice « Ben » est moins positif que l’indice « Janet ». Selon cette mesure, cette dernière serait moins « colombe » que le président de la Fed. Quoi qu’il en soit, les deux indices demeurent trop bas, toujours très inférieurs à leurs moyennes de 2003-07, probable objectif de la Fed (qui ne retient sans doute pas le niveau historique médian, celui-ci ayant été artificiellement abaissé par la crise de 2008-09).Selon nous, lorsque ces indices évolueront un écart-type sous leur moyenne de 2003-07, la Fed pourrait mettre fin à QE3. Le taux cible des Fed Funds pourrait être relevé une fois la médiane de 2003-07 atteinte. Nos prévisions d’activité et d’emploi placent le premier événement début 2014 (avec un ralentissement des achats mensuels à partir de la fin de l’été) et le second à... la mi-2015. Si la formulation de la forward guidance est devenue plus complexe, mais aussi potentiellement plus flexible, elle n’a pas changé d’un iota !

En effet, et comme le montre la répartition des opinions quant à la date probable de relèvement des taux, une grande majorité des membres (treize) considère 2015 comme la bonne date ; seuls cinq membres préféreraient un resserrement plus rapide. Nul doute qu’Esther L. George figure parmi eux. Comme en janvier, elle a en effet voté contre la dernière décision, redoutant que « le maintien d’une politique monétaire très accommodante puisse accroître les risques de futurs déséquilibres économiques et financiers et, à terme, entraîner un relèvement des anticipations d’inflation à long terme ». Un faucon bien seul au pays des colombes.