Chine et Brexit : les Banques centrales impuissantes

 | 07/08/2018 12:12

Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr

Quelle séquence sur les marchés ! Si la canicule donne un coup de chaud aux vacanciers, eux aussi font monter la température ! Je ne reviendrai pas sur le record de capitalisation d’Apple (NASDAQ:AAPL), qui a capté l’attention des rédactions des médias économiques, désertes en ce début du mois d’août et qui cherchaient un os à ronger. A mon sens, l’évolution des devises est bien plus intéressantes à suivre et elle permet de chercher, sinon des opportunités, en tout cas des catalyseurs et des indicateurs de stress.

A cet égard, comme l’écrivait Philippe Béchade la semaine passée, le yuan s’est replié de plus de 9% en trois mois et demi. Dans ce contexte, la Banque centrale demande désormais des réserves plus importantes à ceux qui veulent vendre la devise chinoise… Ah, ce marché libre !

Mais le mal semble fait et de nombreux traders parient déjà sur un dollar valant plus de 7 yuans d’ici la fin de l’année. C’est ce que le Wall Street Journal appelle la revanche des China Bears.

▶ Le yuan pourrait bien continuer de dévisser
Concrètement, ce sont plus de 7 Mds$ qu’ont pu se partager les « short » sur la devise et les actions chinoises ces derniers mois, après de nombreuses années de douleur et de souffrance devant la résilience de l’économie de l’empire du Milieu.

Cette évolution n’est toutefois pas sans conséquences néfastes pour plusieurs entreprises chinoises qui accusent à présent le coup, ou plutôt le « coût »… de refinancement. En effet, le « deleveraging » voulu par les autorités chinoises a déjà conduit 18 sociétés avec des obligations cotées à faire défaut au premier semestre (il y en a eu 23 sur l’ensemble de l’année écoulée) et il y a fort à parier pour que ce mouvement s’intensifie, sur fond de tensions commerciales croissantes avec les Etats-Unis.

Selon S&P, des dettes s’élevant à quelque 11 000 milliards de yuans seront dues en Chine d’ici trois ans, ainsi qu’une dette de 215 Mds$ émise à l’étranger. De quoi nous donner de belles frayeurs d’ici là !

▶ Le risque d’un « hard Brexit » s’accroît
La Bank of England (BoE) se débat elle aussi comme elle peut, mais si son gouverneur Mark Carney a bien augmenté les taux comme le marché l’avait anticipé de 0,5 à 0,75%, le ton est si prudent que cette hausse semble anecdotique.

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Surtout, les incertitudes quant à la conduite du processus de sortie de l’UE plombe sérieusement la visibilité économique du pays, et donc sa devise.

La BoE a rappelé les craintes liées à la mise en place des politiques protectionnistes, alors que Donald Trump s’est employé à « torpiller » le projet de « soft Brexit » de Theresa May (projet qui a également suscité les démissions des ministres David Davis et Boris Johnson le mois dernier), menaçant qu’en cas de pareil accord, les Etats-Unis négocieraient avec l’UE et non avec le Royaume-Uni. Moyennant quoi, tout porte à croire que ce fameux Brexit pourrait être de moins en moins… soft.

Dans l’immédiat, l’investissement des sociétés anglaises a atteint un plus bas historique, illustrant la défiance en l’avenir. La semaine passée, Bank Of America a en outre annoncé que « parler français serait un atout indéniable » pour ses prochaines recrues, ce qui accrédite l’hypothèse d’un départ pour Paris en cas de « hard Brexit ».

Lundi matin, le secrétaire d’Etat britannique au Commerce international Liam Fox a de son côté estimé qu’en l’état actuel des choses, la probabilité d’un échec des discussions avec l’UE était de 60%, blâmant au passage l’intransigeance de Bruxelles. Ambiance…

Il en a résulté une baisse immédiate de la livre sterling face au dollar américain. Techniquement, la paire revient sur une zone importante à 1,29, mais elle ne montre aucun signe de rebond.