Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
14 Mds€. C’est la capitalisation boursière de la Deutsche Bank (DE:DBKGn), en très grand danger et qui continue de susciter l’ire des investisseurs.
Si le titre a repris quelques couleurs sur fond de rachats à bon compte au cours des dernières séances, l’état de santé de la vénérable institution allemande n’en demeure pas moins très préoccupant. Suffisamment pour que la direction tranche dans le vif, avec un plan de restructuration marqué par la suppression de quelque 18 000 postes à horizon 2022, en sus d’un arrêt de l’activité sur les marchés actions synonyme de réduction notable de la voilure dans la banque d’investissement.
Maigre consolation : sur les 18 000 suppressions d’emplois susmentionnées, « une partie couvre l’intégration de Postbank », a expliqué le CEO. Or, ces réductions étaient déjà intégrées dans les prévisions de DBK, ce qui ramène les réductions supplémentaires à environ 12 000 postes.
Il n’y a par ailleurs aucun projet de discussion avec Commerzbank (DE:CBKG) (une fusion était pourtant à l’étude ce printemps), a assuré le management, qui travaille néanmoins à un changement stratégique d’envergure, a commenté le broker suisse UBS. Toujours « neutre » sur la valeur, ce dernier vient tout de même de relever son objectif de cours de 5,7 à 6,6 €.
Pour l’heure, l’augmentation de capital tant redoutée par les investisseurs, une opération qui aurait à l’évidence conduit à une forte dilution, n’a pas eu lieu, mais rien n’est encore réglé, loin de là, pour « DB ». D’autant que l’activité de financement des grandes entreprises allemandes, objet de son recentrage et voué à devenir son cœur de métier, est très concurrentielle, avec au surplus des conditions de marché loin d’être optimales pour le secteur.
Le futur Lehman Brothers européen ?
Comment, en effet, gagner de l’argent avec un taux à dix ans à – 0,25% comme c’est le cas actuellement ? Comment réussir à dégager des marges avec des rendements négatifs ? Vous conviendrez, l’équation est loin d’être simple.
Et puis l’Allemagne n’est plus ce moteur traditionnel de l’Europe, avec un modèle économique qui commence sérieusement à tirer la langue, comme en témoigne le flux quasi-continu d’indicateurs décevants depuis de longs mois.
« C’est la fin d’un monde. L’Allemagne tourne avec des industries vieillissantes comme la chimie, l’automobile et le secteur bancaire », m’expliquait la semaine dernière un ami banquier, travaillant pour la BNP à Francfort. Les chiffres lui donnent raison puisqu’il ne faudra vraisemblablement pas espérer plus de 0,5% de croissance outre-Rhin cette année, alors que le PIB devrait augmenter de 1,3% dans l’Hexagone.
Quant à la Deutsche Bank, après avoir échoué à devenir le Goldman Sachs (NYSE:GS) européen, elle pourrait devenir le Lehman Brothers du Vieux Continent, surtout si le plan du nouvel homme fort de la banque, Christian Sewing, échoue…
Sur le plan boursier, le dossier demeure extrêmement dangereux et il n’y a plus qu’à espérer une OPA permettant de trouver un chevalier blanc. Une perspective néanmoins loin d’être acquise dans un secteur qui pense surtout à se restructurer, non seulement en raison de la faiblesse chronique des taux, mais aussi à cause de l’essor des fintechs…